• « LES MEMBRES ET L’ESTOMAC » PISTES POUR UNE LECTURE ANALYTIQUE

    En quoi cette fable constitue-t-elle un apologue?

     ou
    Quelle est la force argumentative de ce texte?


    Intro:

    Vers 1650, la France a connu la Fronde, une révolte populaire des Parisiens mécontents des abus du pouvoir royal. Quelques années plus tard, devant les exigences financières croissantes du nouveau ministre Colbert, certains personnages du royaume s'inquiétaient d'une nouvelle révolte. C'est vers cette époque que La Fontaine a écrit cette fable, qui semble soutenir le roi.

    I) Une fable à la structure complexe

    1) Plan de la fable

    v.1 à 4 : intro + intervention du fabuliste

    v.5 à 20 : le récit

    v.21 à 23 : la morale que les membres du corps pourraient tirer de leur rébellion

    v.24 à 32 : la fable se comprendrait comme une allégorie du Royaume de France

    v.33 à 44 : un exemple historique, celui de Ménénius donne l’origine du récit et en prouve l’efficacité

    ó trois niveaux de lecture : le corps humain (l’allégorie), le royaume de France (l’interprétation), la cité de Rome (l’exemple historique)

    2) Mise en parallèle des trois niveaux de récit (voir tableau -->

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    *L’élément détenteur du pouvoir et la perception qu’en donne la fable

    *L’élément gouverné et la perception qu’en donne la fable

    *Le sujet de récrimination et ce qui ramène l’élément gouverné sous l’autorité en place

     

    II) Une morale à la gloire de l’ordre établi, de la hiérarchie ?

    1) Une fable qui a toutes les apparences d’un acte de soumission au roi

    -Récit à trois niveaux a une force persuasive conséquente. Entremêle une fable à un exemple historique pour valider un éloge du pouvoir royal.

    -Les v.1 et 2. Acte de révérence au roi. Aveu d’un manque de respect puisqu’il aurait dû commencer par la fable qui soit à la gloire du roi (commence en fait le livre III par « Le meunier, son fils et l’âne »).

    2) Un texte miné

    On connaît l’hostilité de Louis XIV pour La Fontaine auquel il reproche sa trop grande liberté d’esprit et ses positions anti-colbertistes. Depuis 1657, La Fontaine avait Fouquet (surintendant des finances du Royaume) comme Mécène. Or en 1661, Fouquet tombe en disgrâce et il est arrêté pour détournement de fonds publics. La Fontaine lui reste fidèle et prend sa défense malgré l’acharnement de Colbert. Une telle attitude ne pourrait donc s’allier à un texte dans lequel La Fontaine ferait l’apologie du roi. Il faut donc chercher ce qui dans la fable constitue un second degré.

    -Le texte par lui-même : la clé se situe en fait au début de la fable. La Fontaine écrit v.3 « A la voir [la royauté] d’un certain côté ». cela signifie que s’il existe « un côté » par lequel on peut voir la royauté comme un organe essentiel, il existe aussi « un autre côté » par lequel on peut la voir différemment ! Dans un état de pouvoir absolu, là se limite la liberté : pas de critique directe envisageable, il faut effectuer une lecture et une interprétation de simples sous-entendus.

    Notons ensuite par le tableau établi (2) quelques faits intéressants : La Fontaine n’hésite pas à détailler les torts qui sont faits au gouvernement romain mais n’en fait aucun à l’encontre du roi. Pourtant, si l’on applique la comparaison induite par celle de l’estomac, il faut donner au pouvoir royal les mêmes qualificatifs déplaisants (v.35-38). La subtilité du texte, c’est que cette critique n’est jamais frontale.

    ? Par ailleurs, si le corps dépérit pour n’avoir pas nourri Messer Gaster, le peuple de Rome de son côté n’a rien perdu en rejetant le pouvoir du Sénat. Il n’a fait que retourner à « son devoir » v.44. C’est un acte de soumission consécutif aux paroles séduisantes d’un orateur. Pour autant les paroles de Ménénius étaient-elles vraies ? Rien ne le dit. Dans ce cas, faut-il croire les paroles du fabuliste qui prétend lui aussi faire l’apologie d’un pouvoir que rien ne justifie ?

    Enfin, si nous sommes attentifs au texte, nous relevons v.24 « grandeur Royale ». Il s’agit ici d’être vigilant, car ce n’est pas la même chose que « le roi ».

    -Les abords du texte

    Dans le livre III des Fables, on trouve après « Les membres et l’estomac », « le loup devenu berger » puis tout de suite après « les grenouilles qui demandent un roi ». Que raconte cette fable ? Un peuple de grenouilles qui vivait en démocratie demande au ciel un pouvoir monarchique. On leur donne d’abord un soliveau (un morceau de bois) mais comme elles le trouvent trop tranquille et se plaignent, on leur donne une grue qui les dévore. Et Jupin « le Monarque des dieux » leur conseille de s’en contenter si elle ne veulent pas avoir encore pire. Ce n’est tjrs pas un texte en faveur des rois.

     

    Conclusion:

    -Fable qui en réalité constitue une critique détournée très habile. La structure complexe de récit enchâssé permet à La Fontaine de développer un texte à double sens.

    -C’est la seule critique possible face à un pouvoir absolu aussi rigide que celui de Louis XIV. A partir de  Louis XV (1715), cette rigueur de la censure se fissure et peu à peu ; les penseurs vont oser affronter le pouvoir en place. Cela aboutira à la chute de la royauté à la fin du siècle.

     

     

     

     


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  • Commentaires

    1
    laural Profil de laural
    Mercredi 9 Juin 2010 à 21:25
    C4EST LAURA j'ai pas réussi a accéder même avec le mot de passe pour ajouter article
    2
    revisionsdefrancais Profil de revisionsdefrancais
    Jeudi 10 Juin 2010 à 13:31
    Quand as-tu essayé?
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